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27/02/2018

Armel combat ces pesticides qui ont pourri sa vie


Armel Richomme est une victime des pesticides, ayant traité ses céréales sans protection particulière pendant des années et sans être informé du danger. S’il en paie aujourd’hui le prix fort, il mène une lutte acharnée contre le système phytopharmaceutique.



Il sera bientôt à Nantes au colloque organisé par l’association France Lymphome Espoir (FLE) pour témoigner sur sa grave maladie provoquée par l’inhalation des pesticides. En janvier, il intervenait à Nouvoitou pour dénoncer ces produits mortifères. Dans le même temps, il a décliné un rendez-vous avec un journaliste et une invitation à Saint-Nolff (56) pour débattre sur le même sujet... « Ce n’est pas facile d’être partout à la fois, il faut bien choisir ! », s’excuse t-il.

Il, c’est Armel Richomme, agriculteur à la retraite, âgé de 62 ans : « Je parle autant que je le peux de ces produits chimiques qui empoisonnent silencieusement la vie des gens et dont la dangerosité est sous-estimée par le business phytopharmaceutique. Je le fais aussi pour remonter le moral des victimes, m’informer sur les actions en cours et à venir... L’opinion publique doit savoir. »

Armel a maintenant arrêté ses activités agricoles, mais il s’est engagé bénévolement à fond auprès de plusieurs organismes : Santé Liberté Bretagne, Soutien aux victimes des pesticides de l’Ouest, association Phyto-victimes et FLE. « Je dénonce, c’est mon rôle. Je ne compte pas le temps que je donne à ces associations, mais les gens doivent savoir ce qu’il en est. Il faut que ça fasse du bruit autour de nous », expose t-il calmement.

Il n’y a pas si longtemps, Armel soutenait encore les deux salariés de la coopérative agroalimentaire Nutrea-Triskalia qui avaient été intoxiqués par les pesticides et ensuite licenciés par leur employeur... Tous deux ont été indemnisés pour le préjudice subi. En parallèle, Armel mettait de l’huile dans les rouages entre des associations de riverains et des agriculteurs traitant sans précautions.

Armel combat ces pesticides qui ont pourri sa vie

Un long combat depuis 2006

Son épouse Brigitte a quant à elle la dent bien plus dure. « Armel est trop tendre, dit-elle en lui souriant avec tendresse. Moi je me bagarre pour que sa maladie soit reconnue "maladie professionnelle". On le balade de service en service, on lui ment, c’est une honte ! Beaucoup de personnes ne sont plus là pour parler, on ne compte plus les veuves et les orphelins. On ne retient plus notre langue pour dénoncer, c’est un vrai bonheur de pouvoir le faire. »

Armel a vécu un véritable parcours du combattant pour en arriver là. Pour lui, tout commence en 2006 lorsque, sans raisons apparentes, il souffre de sueurs nocturnes et ressent une grande fatigue. Les deux premiers médecins qu’il consulte mettent cela sur le compte de son activité professionnelle et de son âge. Armel n’en croit pas un mot.

De fil en aiguille, après moults examens médicaux et bilans de toutes sortes, il apprend en 2011 qu’il développe un cancer du système lymphatique. Son monde s’écroule. Certes, pendant des années, il a traité ses cultures avec des produits chimiques, sans masque de protection. Le nez au vent mauvais. « Des produits sentaient bien sur très fort, concède t-il. Mais à cette époque on en sous-estimait la dangerosité. Je me suis libéré de ces poisons à partir de 1998, lorsque j’ai commencé ma conversion au bio. J’ai alors limité les antibiotiques pour soigner le bétail, passé à l’homéopathie puis à l’aromathérapie. J’ai été certifié bio en 2001, c’était 10 ans avant la survenue de ma maladie... » Oui mais voilà, le ver était dans le fruit.

Armel combat ces pesticides qui ont pourri sa vie

Un malade hyperactif

Le dossier médical d’Armel, épais comme le bottin de Paris et sa région, s’enrichit régulièrement de nouveaux résultats d’analyses médicales. « On me fait une prise de sang par trimestre. J’ai rencontré hier mon hématologue et tout va bien », se réjouit-il. Armel est abonné aux revues publiées par les associations auxquelles il adhère. Il connaît tout ou presque tout de sa maladie. « Ce n’est vraiment pas un malade passif », assure son épouse.

Aujourd’hui, Armel a pris sa santé en main pour être moins dépendant des thérapeutes... Certes l’administration sociale agricole traîne les pieds sur son dossier, mais il ne se décourage pas. Hors son combat, Armel bricole dans ses dépendances, va voir ses enfants à Paris, s’occupe de ses chiens border collie et berger belge... Il mord dans la vie à pleines dents, bien qu’il accuse toujours une petite fatigue de fond...

Patrice Charbonnier





1.Posté par gaillard marie-claude le 04/03/2018 12:34
Cela peut arriver tout près de chez soi, mais comment réagir si on le constate ? Que faire ? Le producteur ou agriculteur n'est souvent pas bien informer. S'il l'était, aurait-il e devoir de prévenir ses voisins très proches ?

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