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10/02/2023

L'insertion, ça s'écoute ! Sur les ondes de Radio Kalon, à Vannes

Texte : Jean-Luc Poussier - Photos : Marie-Anne Divet


Créée il y a trois ans, Radio Kalon multiplie les initiatives et les projets où se croisent, se forment, dialoguent et s’amusent des publics à priori pas destinés à se rencontrer. Ses bénévoles déploient des trésors d’inventivité et d’ingéniosité pour pallier à des moyens plus que modestes.


Antoine Joullié (à g.) avec Lucie, Kevin, Tristan et Julien
Antoine Joullié (à g.) avec Lucie, Kevin, Tristan et Julien
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De cœur, ils ne manquent pas et de courage non plus. C’est suffisant pour justifier le nom de cette petite radio associative, Kalon en breton signifiant cœur et courage ! Ils sont venus à quatre en ce début d’année, Lucie, Kevin, Tristan, Julien  rejoindre Antoine dans le séjour de son pavillon situé non loin de la rivière de Vannes pour préparer leur prochaine émission de radio.

L’ancien conseiller en gestion s’immerge dans l’associatif

C’est en arrivant à Vannes en 2018, après un parcours professionnel et personnel fait de métiers et de rencontres diverses, qu’Antoine Joullié décide de lancer Radio Kalon.
« J’ai découvert les radios associatives à Rouen en 2008 alors que j’écoutais Radio HDR, une radio des quartiers populaires des hauts de Rouen.»
Il était alors conseiller en gestion dans une banque pour les petites et moyennes entreprises. Son licenciement arrive à un moment où il s’interroge sur le sens de son engagement professionnel. Il s’immerge pendant un an dans le bénévolat à la fois au service du samu social de la Croix Rouge et au sein de cette radio associative en ayant l’idée d’utiliser ce média pour réaliser des reportages sur l’activité du samu social.

Tout en poursuivant sa carrière professionnelle qui le mènera en Bretagne où il a des attaches familiales, il ne perd pas de vue son envie de continuer à faire de la radio.
« En fait, je portais l’idée de Radio Kalon depuis très longtemps, c’est-à-dire l’idée d’une radio qui soit la charnière entre des publics vulnérables et des auditeurs afin de créer du lien et de faciliter leur insertion sociale et professionnelle. » 
Installé à Vannes, il va tester l’idée près des compagnons d’Emmaüs en leur proposant des ateliers radio où ils peuvent s’exprimer et proposer des émissions sur des thèmes qui les intéressent. Assez rapidement, il voit l’intérêt suscité par son initiative. Les ateliers radio sont l’occasion d’un travail de groupe enrichissant qui aide certains intervenants à sortir de leur isolement.

Pour chaque émission, le groupe choisit un thème et se répartit les tâches
Pour chaque émission, le groupe choisit un thème et se répartit les tâches

Un foisonnement d’idées et d’initiatives portées par les animateurs-acteurs de la radio

Depuis, il  a considérablement étoffé son équipe. Tristan, par exemple, qui fait son service civique, a rejoint RK il y a huit mois. Intéressé par l’humour et le stand up, il fait des chroniques régulières. Kevin, de son côté, prépare des émissions à caractère sportif et Julien, reconnu travailleur handicapé, est en contrat de qualification à C’lab, une radio rennaise. Il vient aussi préparer des émissions a Radio Kalon.

Lucie, qui est en domicile groupé accompagné à Saint-Avé (1), vient régulièrement participer aux ateliers radio. « On n’aime pas rester entre nous, dit-elle, mais au contraire s’ouvrir aux autres. La radio, il faut qu’elle soit dehors et dans la vie. » Les participants sont aussi des migrants ou viennent de la mission emploi de Vannes et d’Auray, des Cuisiniers Solidaires ou encore de  Vannes Relais.
« Pour chaque émission, explique Antoine, on réunit un petit groupe de quatre à cinq personnes. Ils choisissent un thème et se répartissent les tâches pour animer l’émission. »
Les sujets ne manquent pas et sont réalisés le plus souvent en partenariat comme avec le Salon du Chocolat à Vannes ou pour les Nuits Soniques - deux jours de musiques, de performances artistiques et d'ateliers pour tous à Auray en septembre dernier - ou encore pour le festival Algues au Rythme en mai prochain à Arradon. Sans oublier le projet européen en coopération avec Malte et l’Italie pour assurer 40 heures de formation au journalisme citoyen afin d’illustrer dix articles de la Déclaration des droits de l’homme.

Sur Radio Kalon, on retrouve tous les podcasts des émissions précédentes : on se rend compte alors à la fois de l’éclectisme des sujets proposés et de la bonne humeur qui règne dans le studio d’enregistrement, ceci en restant fidèle à une ligne de conduite. La radio est ainsi considérée comme un outil d'insertion à travers des émissions diverses, par le biais des témoignages, des reportages, des ateliers faits par les personnes en insertion et à destination du grand public…

Avec un impact social double. Vis-à-vis des bénéficiaires, cela contribue à redonner confiance et à se réinsérer dans la société, par une dynamique de groupe et de projet, en libérant la parole. Vis-à-vis des auditeurs, cela permet de mieux connaître les conditions de vie, d’encourager des comportements sociaux, d’aider d’autres auditeurs…

Un équilibre financier encore fragile et peu de moyens

Cöté fincances, la radio associative a des moyenes limités. Pour l’instant, le streaming (2) est hébergé gratuitement et les charges sont celles de deux salaires, celui d’Antoine et celui de Julien en contrat de qualification. Assurément, les dons sur HelloAsso sont les bienvenus...
« Pour le moment, nous avons environ 5% d’aides publiques sous forme de subventions, le reste se répartit à peu près également entre la vente de prestations radio et le mécénat d’entreprises et de particuliers. »
Avec une moyenne de 50 à 100 connexions par jour sur le site web, Radio Kalon est encore relativement peu écoutée. L’ambition est de décrocher une fréquence radio sur la radio numérique terrestre pour élargir son audience.

Jean Luc Poussier

(1) Le Département du Morbihan a lancé des domiciles groupés accompagnés (DGA) pour des personnes handicapées psychiques, des personnes autistes ou handicapées physiques, sans exclure d’autres situations de handicap. Conçu sous forme de maisons partagées ou appartements individuels groupés, un DGA réunit six adultes handicapés qui ont besoin du soutien de professionnels. Le domicile groupé, parfois porté par une association de parents, dispose d'une cuisine et d'un séjour communs et de chambres personnalisées. L’établissement bénéficie d’un personnel d’accompagnement (auxiliaire de vie, aide médico-psychologique…).

 (2) Technique de diffusion et de lecture en ligne et en continu de données multimédias, qui évite le téléchargement des données et permet la diffusion en direct (ou en léger différé).
 
Voir aussi sur notre blog "Bienvenue"



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