
Elise Torcoletti, administratrice de production et programmatrice de Lieux Mouvants, village de Saint-Antoine à Lanrivain
Du 6 juillet au 24 août, les rencontres se succèdent cet été dans le village de Saint-Antoine à Lanrivain faisant revivre ces maisons de granit dont les plus anciennes ont été bâties au XVIe siècle. Durant deux mois, artistes et écrivains, penseurs et chercheurs, rêveurs et utopistes, entrepreneurs et jardiniers se succèdent, offrant au public un échange en face à face au cœur d’une nature demeurée sauvage.
« C’est un rendez-vous qui fédère les passionnés de nature, d’art, de danse, de musique, de connaissance, de culture, au gré des expositions, rencontres, spectacles et performances, confie Elise Torcoletti, administratrice de production et programmatrice depuis 2020. Les événements se tiennent dans des lieux extérieurs connus ou moins connus permettant ainsi au public de découvrir des espaces naturels étonnants. »

Jean Schalit et Pierre Rabi à Lanrivain, le 16 août 2015
Une idée de Jean Schalit, homme de presse et écrivain
Cette idée saugrenue vient de Jean Schalit, homme de presse et écrivain, décédé en 2020 à l’âge de 84 ans. Au début des années 1960, dans les traces de son père Henri, éditorialiste du quotidien économique L’Information et directeur après-guerre du magazine Sciences et voyages, Jean rénove la revue Clarté, à laquelle participent notamment Serge July, Bernard Kouchner, Pierre Kahn. Au début des événements de Mai 68, le militant engagé au parti communiste français, crée le journal Action qui le 7 mai, lance un appel « à la grève générale et à l’insurrection permanente » ! Après avoir travaillé dans des agences de publicité et tenté de lancer plusieurs projets de presse, il se spécialise dans l'infographie et la production d'images. En 1973, il achète avec sa femme Jacqueline, à Lanrivain, les ruines d’un vieux manoir du XVIIe siècle. Patiemment, tous deux le restaurent et le dotent, aidés du paysagiste Gaël Boëdec, d’un jardin remarquable, le Grand-Launay, qu’ils ne tardent pas à ouvrir au public.
Le carnet d’adresses regorge de contacts. Jean, dont la vie s’organise désormais entre Paris et Lanrivain, est passionné d’art, de rencontres et de nature. Il ne tarde pas à faire découvrir à ses amis ce petit coin de Bretagne qui emplit sa vie. Le festival Lieux Mouvants s’installe à Lanrivain.
Le carnet d’adresses regorge de contacts. Jean, dont la vie s’organise désormais entre Paris et Lanrivain, est passionné d’art, de rencontres et de nature. Il ne tarde pas à faire découvrir à ses amis ce petit coin de Bretagne qui emplit sa vie. Le festival Lieux Mouvants s’installe à Lanrivain.

Le vieux village de Saint-Antoine reprend vie
Avec le village de Saint-Antoine pour décor
« Ça commence en 2013, se souvient Elise, dans le jardin de Jean Schalit avec des expositions d’art plastique et des spectacles de danse contemporaine. D’emblée, le public, curieux, très varié, est au rendez-vous, séduit par l’initiative alors novatrice. »En 2014, le festival s’installe au village de Saint-Antoine que la communauté de communes du Kreiz Breizh est en train d’acquérir. Les ruines de ce village sont saisissantes. Aux heures de gloire, une centaine d’habitants y demeuraient jusque dans les années 1980 où il est délaissé. Le lieu est propice pour y installer une scène. Mais le festival se veut itinérant et « mouvant » alors des spectacles sont aussi organisés dans plusieurs sites emblématiques du territoire comme l’ancienne carrière gallo-romaine de Locuon ou le château du Crosco à Lignol dans le Morbihan voisin.
« Jean Schalit va à la rencontre d’habitants, de bénévoles et d’associations qui se battent pour valoriser un site patrimonial oublié ou abandonné. En y proposant rencontres culturelles et artistiques, on double ainsi nos énergies. »Faire venir des artistes, habitués des grandes salles et équipements culturels urbains, ici, en Centre-Bretagne, au cœur de la lande et du granit breton ! Le défi est osé. Mais pourtant, un nombre impressionnant de personnalités vont être séduites par la proposition et l’authenticité du propos. La scène est posée au milieu du jardin, du parc ou de l’espace public. Le contact avec l’artiste est direct, sans fioriture. L’accès à la proposition artistique se fait sans détour. Jane Birkin, Agnès Jaoui, Pierre Rabhi, François Morel, Miossec, Daniel Buren, Erik Orsenna pour n’en citer que quelques-uns vont tomber sous le charme de ce petit coin de Bretagne, ravis de l'accueil que les habitants leur accordent. La culture populaire et traditionnelle est aussi à l’honneur et tous les grands noms de la scène celtique et bretonne défilent à Lanrivain.
« Lieux mouvants devient une association portée par des habitants du centre-Bretagne imprégnés de l’idée qu’ici aussi, on peut faire des choses assez extraordinaires, de haute qualité, sans bénéficier pour autant des infrastructures et financements dont dispose le milieu urbain. »

L'art plastique s'installe au coeur d'une nature préservée
La transition écologique au cœur de la programmation
Rapidement, Lieux Mouvants affirme une intention politique tournée vers la transition écologique. Le festival se déroule en pleine nature, intégré au paysage, peu de jeux de lumière, pas d’engins de levage, des produits locaux pour la restauration, une petite jauge de public avec en moyenne trois cents personnes par jour, une intention de zéro déchet… Et une programmation de rencontres (pas de « conférences ») résolument ouverte sur les nouvelles énergies, les alternatives économiques, l’eau, la forêt, l’agriculture paysanne…
« …avec parfois des propos contradictoires, précise Elise, sans animateur ni médiateur ou power point qui défile sur un écran ! L’idée est de déclencher un débat, mettre les esprits en mouvement, offrir au public des idées, des arguments, des réflexions, une boîte à outils ou simplement, surprendre parfois… irriter. Ce sont les participants qui, en prise directe, échangent avec l’intervenant, car eux aussi, savent. Et nous faisons en sorte que l’intervenant soit en mesure d’accueillir le sachant en face d’eux pour faire avancer l’échange. »

En 2014, deux lauréats du concours de Lieux Mouvants créaient leur Jardin de landes
Pour une culture accessible à tous
Le prix d’entrée est de 10 € par jour (5 € au début) avec toujours trois propositions, une exposition, une rencontre, un spectacle.
« Nous souhaitons rendre la culture accessible à tous à un moindre coût. Les artistes sont payés au tarif qui est le leur. Nous sommes un produit de la décentralisation et les recettes sont constituées des entrées mais aussi, pour 60 %, de subventions publiques, Etat, Région, départements, communauté de communes et communes. A 15 % de fonds privés d’entreprises locales et de fondations qui nous soutiennent. Le reste, ce sont des fonds propres et des dons du public. Soyons clairs : il ne reste rien en trésorerie à la fin de l’été et tout est réinjecté dans le projet ! »Un deuxième volet anime les membres de l’association, celui de la valorisation des paysages et des jardins de Bretagne. Colloques, stages, ateliers et rencontres sont proposés dans l’année dans divers jardins et lieux de Bretagne associant paysagistes, enseignants, botanistes, architectes, jardiniers, animateurs nature.

En 2019, Agnès Jaoui était sur la scène de Lieux Mouvants
Des bénévoles engagés dans la vie du territoire
Deux salariées à plein temps assurent l’animation et la coordination des activités. Anna Le Gallou, originaire de Baulon, a en charge depuis 2024 la production et la communication. Elise Torcoletti, originaire de Ploërmel, assure l’administration et la programmation depuis 2020. Titulaire de divers diplômes sur l’art, le spectacle vivant, le théâtre, la danse et le cinéma, elle a exercé dans diverses structures culturelles de Bretagne et de Bourgogne. Mais Lieux Mouvants est pour elle un projet unique et incomparable :
« D’abord, il n’y a pas de salle et donc pas d’obligation de remplissage ni de chiffre. C’est une occasion unique de croiser de nombreuses disciplines différentes en un après-midi. La programmation offre une grande liberté et diversité, le public peut ainsi découvrir des propositions artistiques inattendues. Il y a enfin cette grande proximité avec les artistes, un rapport très humain et un public engagé qui n’est pas consommateur. »L’association sollicite par ailleurs des intermittents du spectacle, régisseurs, illustrateurs et infographiste. Le conseil d’administration est constitué de deux co-présidents, Nicole Zeizig et Bernard Le Douaron et de cinq administrateurs. Parmi les 75 adhérents, une cinquantaine de bénévoles, sont présents tout au long de l’été à tour de rôle pour assurer le fonctionnement du festival.

Entre les murs en ruine, une sculpture
Sorti de la tourmente, Lieux Mouvants a su remonter la pente
Comme beaucoup de manifestations culturelles, Lieux Mouvants a subi de plein fouet le contre-coup de la période covid. D’autant que l’association a choisi de rémunérer tous les artistes qui n’avaient pas pu être accueillis en 2020. De plus, le décès de Jean Schalit cette même année a semé le doute… Mais, tous ont retroussé les manches pour construire un modèle associatif plus participatif en multipliant les groupes de travail thématiques.
Lieux Mouvants
« Il a donc fallu deux ans pour reconstruire le projet, remonter la pente et redonner confiance aux bénévoles et aux partenaires. Cette année, nous nous sommes associés à un collectif d’associations et avons été lauréats de l’appel à projet de la Fondation de France « Inventer demain » ; nous avons choisi, pour les trois années à venir, la thématique de l’eau que nous relions à une autre thématique sur le bocage et les haies. Avec cette intention toujours présente de mettre les femmes en avant…"Programmation 2025 à découvrir en cliquant sur ce lien :
Lieux Mouvants

Quelques membres de l'association Lieux Mouvants, village de Saint-Antoine, Lanrivain - avril 2025