Cinéma


Dancing Pina

27/04/2023


20220427 Dancing Pina.mp3  (3.45 Mo)

De Florian Heinzen-Ziob (en salle depuis le 12 avril)

Le documentaire "Dancing Pina" montre avec justesse la transmission du répertoire remarquable de la chorégraphe Pina Bausch à la jeune génération. Danser du répértoire de Pina, que l´on vienne de la Streetdance, du ballet classique ou de la danse traditionnelle et contemporaine de différents pays d´afrique, transforme l´oeuvre, tout comme l´oeuvre elle-même transforme les danseurs et danseuses.

Le sacre de la danse

L’océan est énorme. Il roule, déferle, tonne entre eau et sable. L’air est plein de lumière et de sel. En contre-jour, quatre silhouettes.
 
Quatre hommes dansent. Quatre danseurs volent, ondoient. S’agit-il d’hommes ? D’arbres qui soudain remonteraient des grandes fosses et s’arracheraient aux embruns ? S’agit-il d’algues verticales. L’image est sublime.

On retrouve ce vacarme océanique, pas d’autres mots, au générique final, défilant sur fond noir, de Dancing Pina.

Docu à voir d’urgence, de Florian Heinzen-Ziob.

S’il y a dans cette période si dure, le boucan des rues, maintenant des batteries de cuisine, s’il y a cette anxiété française indéniable et cet effroi mondial épouvantable, glaciers qui fondent, rivières et fleuves à sec, si tout ça plombe bel et bien l’ambiance, coupe en deux les repas entre copains, il y a aussi le sublime, le transcendant, la beauté.

Il y a la danse.

Dancing Pina.

Pina Bausch est morte en 2009. Son œuvre continue.

Assister aux répétitions à Dresde ou en Afrique, à l’école des sables de Dakar, nous enjoint à la joie.

Aimer les (vieilles) danseuses du Tanztheater de Wuppertal qui ont travaillé avec Pina. Elles transmettent son travail, reprennent ses chorégraphies, trouvant dans les corps d’aujourd’hui les mouvements d’hier qu’elles renouvèlent, revitalisent, subliment.

Voir le silence qui s’abat sur le grand réfectoire des trente ou quarante danseurs quand on leur annonce que Dakar, pandémie mondiale oblige, annule les dates. Et Paris et Berlin ou Montréal. Après tout ce travail, ces efforts inouïs, ces corps en l’air, en bas, à terre, au ciel, tout ça rayé d’un trait de masque et de gel hydroalcoolique. Les deux événements entrent en collision : le foutu virus inconnu et la danse sublime, mon fils m’aurait vu pour la première fois sur scène dit une jeune danseuse du Togo, du Bénin ou du Burkina Faso.

Assister, nous sommes les seuls, au spectacle. La plage immense est ratissée en sorte qu’un grand carré se dégage. Un attelage étrange passe par hasard, en haut à gauche de l’écran. Les enceintes donnent à fond, moins à fond que l’océan devant lequel Stravinsky nous envole. Gluck à Dresde (Iphigénie en Tauride), ici, sur la plage, danse totale, du feu, du sang, Sacre de l’océan !

Sublimes rituels. Ces corps qui volent, se cassent, s’effondrent sur eux et reprennent leur ronde parfaite et sublime. C’est beau, arrêtons de l’écrire, concluons :

Par les temps qui courent, tristes à pleurer, Pina Bausch relance la force vitale et le rêve des hommes de s’envoler. Ils s’envolent. Pina in aeternam !

Gilles Cervera 

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