Rebelles non-violents

"Pourquoi désobéir en démocratie ?"

Mercredi 25 Juillet 2012


 "Pourquoi désobéir en démocratie ?"
Concert de casseroles du Printemps érable au Québec, campement devant la Cathédrale Saint Paul à Londres, au Parc Zuccoti à New York, des milliers de personnes qui occupent pacifiquement l'espace publique à Tokyo, Montréal ou Madrid. Interviewée dans le Télérama du 18 juillet, la philosophe Sandra Laugier, co-auteur avec Albert Ogien du livre "Pourquoi désobéir en démocratie ?", réédité en 2011 aux éditions La Découverte, pose le problème : « Les contestations montrent que les démocraties sont confrontées à leurs limites. Que nos démocraties, dont nous sommes si fiers, ne sont pas si démocratiques que cela et qu'on peut s'interroger sur la réalité de l'expression de chacun. »

Ce qui interroge ? face au caractère non-violent des manifestations qui s'inscrivent dans la tradition de désobéissance civile du philosophe états-unien Henry Thoreau, la réponse des gouvernants est répressive : durcissement du droit de manifester au Québec, 700 arrestations à New York en 2011, 409 à Oakland en janvier 2012, des policiers surarmés face à des petits vieux contre le nucléaire au Japon... Que se passe-t-il ? « Tout se passe comme si les élites occidentales étaient entrés dans une forme de guerre contre toute revendication générale de partage des ressources, contre toute vraie contestation de la situation d'inégalité. »

« N'y a-t-il pas des formes de résistances possibles, et nécessaires, en démocratie ? », s'interroge Sandra Laugier, « Doit-on avoir peur de la démocratie lorsque celle-ci exige de respecter pleinement la voix de chaque citoyen ? » Elle s'inquiète de la façon dont les gouvernements présentent ces mouvements comme "irresponsables" et "illégitimes" et les décrédibilisent, comme s'il y avait une "bonne" et une "mauvaise" façon de revendiquer.

En France, les mouvements de désobéissance civile, définie par Thoreau comme non seulement un droit mais un devoir de résistance quand le gouvernement agit contre ses propres principes, sont bien présents : les arracheurs d'OGM, Réseau Education sans frontières qui cachent les élèves étrangers menacés d'expulsion, les instituteurs qui refusent de faire passer les évaluations, les agents de Pôle Emploi qui ne communiquent pas le nom des chômeurs à radier, les fonctionnaires qui refusent de pratiquer la tarification à l'acte à l'hôpital... « Ils sont le symptôme de l'état dans lequel se trouvent les pratiques de la démocratie dans l'Europe contemporaine, face à l'exceptionnelle disparité du rapport de pouvoir entre capital et travail qui règne aujourd'hui dans le monde. Mais traduisent aussi le maintien d'une ferme vigilance démocratique de la part des citoyens, d'un combat permanent, celui de la démocratie radicale, qui se livre sur toutes sortes de champs de bataille. », conclut Sandra Laugier.

A lire

"Pourquoi désobéir en démocratie ?" d'Albert Ogien et Sandra Laugier, éd.La Découverte, réédition 2011, 216 p., 9,20 euros.
Extrait de l'introduction sur Mouvement des idées et des luttes


1.Posté par Patrig K le 27/07/2012 10:58
Il y a aussi et probablement le fait que les populations occidentales, ont acqui des savoirs durant le siècle passé et aujourd'hui encore plus par le vecteur multimédia et internet ( l'outils au multiple tranchants) , quand en parrallèle, les modèles de choix des représentations et des représentants politiques qui en découlent pour les prises de décisions , n'ont guère évolué depuis plus d'un siècle ... De fait, la conscience citoyenne profonde s'en trouve quasi exclue ( l'abstention en est l'expression la plus visible), et la défiance de s'installer dans toutes les strates de nos sociétés.

Pierre Rosanvallon (Collège de France) a beaucoup travaillé sur ce sujet, et je recommande sa lecture , meme quand on ne partage pas tous ses points de vue... Merci pour ce billet..


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Ce qui m'a intéressée dans les idées de Gandhi, c'est le choix. Ou de réagir à la violence par la violence ou de répondre, en me creusant la tête, d'une autre manière, qui respecte l'être humain, comme un autre moi-même. J'aime cette obligation de faire autrement, d'une façon active et créative, une manière d'être à l'autre et non d'avoir l'autre.
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