19 Décembre 2013 - écrit par - Lu 1039 fois

Dépasser l'école sans haïr les profs !..


A peine remis de la lecture des résultats de l’étude PISA confirmant les piètres scores de notre école républicaine je croisais dans les rues de Nantes la manif des étudiants des classes prépas et grandes écoles. La bonne centaine de manifestants faisait preuve de la réserve propre aux bons élèves, mais on les sentait néanmoins fort remontés contre Vincent Peillon. Le ministre n’a-t-il pas osé penser à un petit rééquilibrage des moyens entre les classes préparatoires aux grandes écoles et les ZEP. Quelle mauvaise idée en effet d’enlever le bénéfice de quelques heures supplémentaires aux professeurs les mieux payés pour un petit coup de pouce à la rémunération des profs de Zep ; enfin c’est ce que j’ai cru comprendre.

Le soir même au cours de ma veille Scoop’it, le titre d’un article sur un blog de Médiapart attire mon attention : « Pourquoi les socialistes haïssent-ils les professeurs ?   ». Daniel Collin y dresse un réquisitoire sans appel contre Allègre, Peillon and co, coupables de « démagogie anti-élitiste » et de laisser « remplacer l’instruction par toutes sortes de gadgets prétendûment pédagogiques », tuant ainsi dans l’œuf les promesses de l’élitisme républicain. Habillés pour l’hiver tous ceux qui, comme moi pensaient qu’il y avait de la place à gauche pour une autre vision de l’éducation, héritière des pensées pédagogiques des lumières autant que de l‘éducation populaire.

Bien sûr la promesse d’égalité de l’école républicaine est à défendre et toute innovation pédagogique n’est pas bonne à prendre : certaines alternatives ne résistent pas plus que le Mammouth à l’évaluation des résultats. Bien sûr il y a une logique à penser qu’au lieu de s’en prendre à l’élite (un peu rapidement décrétée républicaine !) et de faire payer les « classes moyennes » supérieures pour donner aux « classes moyennes » moyennes, il vaudrait mieux s’attaquer à la finance internationale. Tout ça se défend. Mais moi ça ne me suffit pas. Je ne peux pas m’empêcher de sentir comme une petite escroquerie intellectuelle pour justifier que rien ne bouge.

Alors pour prendre un peu l’air je me suis rappelé Ivan Illich et sa proposition (utopique !) d’une « société sans école ». Tous ceux qui pressentent qu’il n’est pas d’école qu'à l’école et que l’institution scolaire a aussi quelque chose à voir avec les systèmes de reproduction des inégalités ont trouvé au moment de la parution de son livre un formidable outil à penser. Ne retrouvant pas l'ouvrage dans ma bibliothèque décidément bien dégradée par mes nombreux déménagements, j'ai déniché sur le site Persé une note de lecture critique  que lui consacrait Joffre Dumazedier — Une société sans écoleRevue française de pédagogie, 1972, vol. 21, n° 1, pp. 88-92.— . Le sociologue théoricien de l'auto-formation et inventeur de l'entrainement mental, présente de manière synthétique et très claire l'analyse et les propositions d'Ilich. On trouve dans cet article et sa conclusion critique une réflexion utile au moment où le web et les nouvelles technologies donnent des perspectives crédibles (mais parfois inquiétantes) au dépassement de l'école.

A lire aussi :

Pour une présentation succincte de l'ouvrage d'Illich un fichier PDF à télécharger    sur le site Recit.net  du réseau des écoles de citoyens.

Et pour ceux qui veulent "penser et repenser l'école" à l'heure numérique un intéressant dossier de Skholè, (skole.fr) une revue éditée sur internet,  animée par des philosophes des sociologues et des chercheurs en sciences de l'éducation. "Penser l'école à l'heure du numérique "

Enfin si vous avez une petite heure pour penser en compagnie de deux philosophes décryptant les gains et les pertes de la révolution du savoir,  ne manquez pas ce dialogue entre Michel Serre et Bernard Stiegler, animé par le directeur de la rédaction de Philomag. 





              

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