Villejean résiste aux vio
Enquête

Villejean résiste aux violences

10 Février 2022

Rencontre avec Julie Gaillard, la CPE, qui a fait le choix de travailler à Rosa Parks


« Les élèves doivent comprendre les codes en vigueur »


Rosa Parks, lieu de socialisation et d’épanouissement
Rosa Parks, lieu de socialisation et d’épanouissement
Julie Gaillard est la conseillère principale d’éducation (CPE) du collège Rosa Parks. C’est sa troisième année. Spontanément, elle exprime sa satisfaction :
« Je m’y plais beaucoup. C’est moi qui ai choisi l’établissement. Contrairement à ce qu’on pourrait  croire, Villejean est mieux doté en effectif que mon précèdent collège de la région parisienne. »
Et Julie Gaillard  de citer quelques chiffres : huit surveillants à temps plein, un médiateur scolaire, un poste et demi de CPE et une stagiaire jusqu’en mars 2022.

« Les élèves doivent comprendre les codes en vigueur »
Cela dit, l’équipe pédagogique est très sollicitée. Julie Gaillard cite un exemple d’expressions de violence entre élèves.
« La première semaine de la rentrée de septembre 2021, nous avons eu une bagarre dans la cour. Une histoire de jeux vidéo prêtés et pas rendus. Les élèves se prêtent leurs comptes pour jouer, quelquefois il y a de l’argent en jeu, ça crée des conflits. »
A la sortie des cours, des éducateurs du Relais 35 sont régulièrement présents devant les grilles de Rosa Parks. Ils connaissent bien les élèves. Ils participent à des animations au sein de l’établissement scolaire. Régis Taligot coordonne l’équipe de cinq éducateurs affectés à Villejean et Beauregard.  
« Nos équipes essaient de contenir, pondérer, raisonner les jeunes. La plupart du temps, ce sont les échanges sur les réseaux sociaux qui favorisent les phénomènes de masse. Une bagarre commencée à dix peut attirer une centaine de personnes, après que l’info ait circulé. »
 Mobilisée et vigilante

Dans son bureau, sollicitée au téléphone par un membre de son équipe ou un professeur, la conseillère d’éducation répond aux urgences. On la sent mobilisée, vigilante au moindre dérapage. Par exemple, la découverte d’une arme - en l’occurrence un couteau de cuisine - dans le sac à dos d’un élève de cinquième.
« Apporter une arme au collège, c’est grave. Nous sommes donc très vigilants. Que ce soit un simple marteau ou un tournevis, ces outils peuvent tuer. On suppose que l’intention de  l’élève est de « frimer » auprès des copains. A chaque fois, on essaie de comprendre, on prévient les parents et on sanctionne. »
Vigilance aussi dans la traque de tout ce que l’on appelle les violences verbales. Soit des élèves entre eux, soit des jeunes avec les adultes, enseignants ou équipe pédagogique. J’observe une affichette en couleur à l’accueil. L’établissement rappelle les formules basiques de politesse. Il faut les répéter inlassablement
« Les élèves doivent comprendre les codes en vigueur au collège. On ne parle pas à un adulte comme on parle à ses copains. Pour que ces codes soient assimilés, il faut que les adultes adoptent tous les mêmes règles de recadrage des élèves. D’où l’idée d’uniformiser la « signalisation » dans toutes les classes et les comportements à adopter en cours. »

« Les élèves doivent comprendre les codes en vigueur »
Lutte contre l’absentéisme

Julie Gaillard continue d’égrener la liste de ses priorités : la lutte contre l’absentéisme, avec la mise en place d’un contrôle heure par heure. J’assiste à une scène pendant la récréation. Une élève vient demander l’annulation de son signalement d’absence au cours de gym. Elle était simplement en retard et n’a pas pu retrouver sa classe. La surveillante est intraitable : l’absence a été signalée, seul  le professeur d’éducation physique pourrait l’effacer. Le règlement, rien que le règlement.
« Un élève absent une journée, c’est un signal d’alerte, confirme Julie Gaillard. L’assistante sociale est prévenue. Les parents également. »
Faire tourner un collège de plus cinq cents élèves, en tenant compte de la diversité de  leurs origines, est un pari quotidien. Comment accueillir au mieux les nombreux enfants originaires de Mayotte ? Un territoire français de l’Océan Indien où les élèves arrivent  avec un niveau de français  plus faible que celui de leurs petits camarades qui ont fait toute leur scolarité à Rennes.  
« Nous avons des élèves en grande souffrance dans le collège. Pour accompagner ceux qui sont en situation de handicap physique ou scolaire, nous aurions  besoin à Rosa Parks d’augmenter le nombre de  places en ULIS* et en SEGPA*. »
Inciter les parents à venir discuter

En attendant des renforts d’enseignants, l’équipe pédagogique tente d’impliquer les parents dans la vie de l’établissement.
« A la rentrée de septembre, nous avons innové avec les classes de sixième. Une cinquantaine de parents sont restés avec nous, après l’appel des enfants. C’était l’occasion de faire connaissance. On incite les parents à venir au moins trois fois dans l’année au collège au moment de la distribution des bilans périodiques (ex-bulletins). Le professeur principal est à leur disposition pour discuter des résultats de leur enfant. »
Rosa Parks a certes perdu quelques dizaines d’élèves à la rentrée scolaire de septembre 2021. Comme les y autorise la carte scolaire, certains parents ont préféré envoyer leurs enfants en centre ville plutôt qu’à Villejean. Ils jugent préférable d’éloigner leurs enfants du quartier. Julie Gaillard ne baisse pas les bras devant cette tendance :
« A nous de réfléchir comment limiter cet exode. On a un an pour mettre en place une stratégie de communication positive sur l’établissement.
Catherine  Verger

(*) ULIS : Unités localisées pour l'inclusion scolaire. SEGPA :  Section d'enseignement général et professionnel adapté.

 



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