La Syrie tourne en boucliers inhumains

En Syrie comme ailleurs, la terre est terreur, l'horreur se rue dans les brancards où un petit coeur s'accroche à ce qu'il est : la vie, entre détresse et souffrance inédite. On salit sa couleur préférée, son premier dessin. On dévie ses premiers pas. Partout, la violence trouble la vue en plein jour, tout alors se déchiquète et se liquéfie comme un géant devant son enfant, un humain devant sa maman. L'aporie éclabousse en sang, les regards flanchent et les voix s'élèvent.


00_la_syrie_tourne_en_boucliers.mp3 La Syrie tourne en boucliers + Musique syrienne de révolution  (7.97 Mo)

Depuis le 17 février 2011, le monde entier suit la même Syrie, toujours pareilles ces séries : basées sur un scénario qui a fait ses preuve en Egypte et en Tunisie, le même dénouement est espéré… Mais non. Bashar ne dégage pas, et le scénario se pare de rebondissements de balles, de bombes pour susciter à l’extérieur, des haut-le-coeur, et à l’intérieur, des au secours qui répondent à des haut-les-mains, aux yeux de tous.  

Alors, les tout-puissants politiques se révèlent impuissants devant le tueur en Syrie que tout le monde connait. Le 1er juin 2012, deux jours après avoir expulsé de France l’ambassadrice de Syrie, François Hollande rencontre Vladimir Poutine. Il soulève alors l’idée d’une intervention en Syrie si elle est validée par le conseil de sécurité. Un porte parole de Poutine glisse : « Il ne faut pas se laisser porter par l’émotion ». 10 jours plus tard, à partir du 11 juin 2012, se tient le salon du matériel des Armées de Terre à Villepinte, près de Paris. Le fournisseur russe d’armes de l’armée syrienne, Rosoboronexport, a son stand dans le salon. A Paris. Natalie Nougayrède, journaliste au Monde commente : « Quinze mois de bain de sang en Syrie, accompagné par une tenace "protection" russe offerte à Damas, n'auront pas suffi, manifestement, pour décourager pareille présence commerciale. La Syrie s'enfonce dans la guerre civile, mais sur le marché des armes, c'est "business as usual"». Business, comme d’habitude, quelle lassitude. En France, scandale. En Syrie, la population scande : Bashar Dégage.

La Syrie tourne en boucliers inhumains
Des applaudissements parisiens pour cette chanson « Bashar dégage » devenue symbole de la révolution syrienne. Le compositeur et chanteur Ibrahim Qashoush a été tué le 4 juillet 2011, il était alors pompier et poète amateur en Syrie. La version a été interprétée lors d’une soirée organisée par des amis syriens et français. Majd Eid, jeune informaticien syrien précise : « En général à Paris, il y a un comité de coordination qui organise les manifs et les autres événements mais celle-la était faite par un groupe d'amis ». Le groupe de musique était composé de Eyad Abo Naim au Derbake, Marianne Babut à la Violoncelle et Kan'an Toulaimat au Luth. Eyad et Kan'an sont étudiants et Marianne, je cite Majd Eid, « voulait participer pour soutenir le peuple syrien et inciter les français à réagir ». Ils ont montré deux films au début : Tournesols qui parle du Massacre Al-Rastan à côté de Homs, le 2 mars 2012 où des bombes sont tombées sur les manifestants pacifiques. Le deuxième parle du massacre de Hamas en 1982 où presque 40 mille hommes, femmes et enfants ont été tués. Vous pourrez retrouver ces films sur la chaine Youtube TheSyriansInFrance. En Syrie, une société civile qui se dresse contre l’oppression alors que l’horreur grandit en empêchant de grandir. Stupéfaction. Indigne nation. L’ONU a publié un rapport selon lequel les troupes syriennes ont torturé, emprisonné, exécuté des enfants et les ont utilisés comme boucliers humains lors d’une attaque de village. Il rapporte que les troupes gouvernementales ont « raflé des dizaines de garçons âgés de 8 à 13 ans avant d'attaquer le village ». Ces enfants ont été ensuite « utilisés par des soldats et des miliciens comme boucliers humains, placés devant les vitres des autocars transportant les militaires pour pénétrer dans le village lors de l'assaut ». La BBC précise que les forces rebelles ont aussi fait la même chose. Alors qu’ils sont sans compte en banque, les enfants à découvert paient la folie des Hommes.


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