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Vildan Ozturk : « La devise républicaine est bien vivante en France ! »



Vildan Ozturk, 19 ans, est Turque, d’origine kurde. En 2011, sa famille décide de quitter Istanbul pour venir s’installer à Redon en Ille-et-Vilaine, en quête de sécurité, de liberté et de sérénité. Rapidement, elle apprend le français, intègre le collège, le lycée, suit un parcours brillant. Une importante mobilisation de la population et des élus a permis d'obtenir enfin le précieux permis de séjour en février 2016. Pour Vildan, liberté, égalité, fraternité résonnent profondément.


« La devise républicaine de la France a tellement de sens pour nous après les épreuves que nous avons traversées »
« La devise républicaine de la France a tellement de sens pour nous après les épreuves que nous avons traversées »
201610_30_vildan_ozturk.mp3 201610 30 Vildan Ozturk.mp3  (6.9 Mo)

Liberté

Chacun devrait avoir le droit de faire ce qu’il veut, tant qu’il ne nuit pas à autrui. Avant, nous ne nous sentions pas libres. Depuis que nous sommes à Redon, nous découvrons ce que peut être la liberté. Nous participons à des rencontres, des activités au centre social, des fêtes qui sont autant d’occasions pour se rencontrer, partager nos cultures… Nous sommes allés vers les gens et du coup, avons été bien accueillis. Je pense que la France est attaquée, justement parce qu’elle est un pays de liberté.  

Egalité

Chacun devrait avoir les mêmes droits. Il ne devrait pas y avoir de différences entre les sexes, les nationalités, les religions…. En Turquie, je ne l’ai pas trop connue cette égalité.
 
Fraternité
 
Nous sommes tous humains et personne ne devrait être supérieur à l’autre. On voit que ce n’est pas si simple… Oui, j’ai rencontré ces trois mots en arrivant en France et jamais, je n’ai été confrontée à la discrimination. D’emblée, on m’a vue comme égale aux autres. La devise républicaine est bien vivante en France. Aujourd’hui, je me sens libre, respectée dans mes choix. Apaisée aussi. La solidarité qui est née pour nous, je trouve que c’est de la fraternité. Les personnes des associations qui nous aident nous voient comme des « Redonnais ». Elles ont tout fait pour que l’on reste à Redon, sans faire de différence… comme des frères et des sœurs. Liberté, égalité, fraternité sont des choses fragiles, menacées dans plusieurs endroits du monde. Il ne faut pas les oublier.
 

VILDAN, UNE VAGUE DE SOLIDARITE POUR L'ACCUEILLIR EN BRETAGNE

« Je suis fille unique, née à Istanbul, une grande ville où j’ai vécu jusqu’à mes 14 ans. Nous sommes d’origine kurde et, dans mon pays d'origine, la cohabitation n’est pas toujours simple entre les habitants de ce pays. Parfois même, entre les Kurdes, elle n’est pas simple non plus, souvent à cause de la religion. En 2011, mes parents ont souhaité quitter la Turquie. La situation était devenue compliquée pour nous et nous étions menacés. Ils ont choisi la France. Pourquoi ? Parce que c’est le pays des droits de l’homme, le pays qui a su conquérir la démocratie à partir de 1789. C’était quelque chose de très important pour eux.
 
L'accueil à Redon, sans papiers 

Alors, nous nous sommes installés à Redon en Ille-et-Vilaine. Nous avons été très bien accueillis et avons sympathisé, entre autres, avec les trois familles kurdes qui résident ici. Mais nous étions en situation irrégulière, sans papiers, sans travail et donc, dans l’impossibilité de trouver un logement. Heureusement, une dame a accepté de nous loger gratuitement, dans le centre-ville de Redon, en attendant que mon père trouve un travail.

Dès en arrivant, je suis entrée au collège de Bellevue en classe de 4e. Avec l’Education nationale, il n’y a pas besoin de papiers pour être acceptée. Je ne parlais pas un mot de français mais les enseignants m’ont tout de suite accueillie, ont pris le temps de m’apprendre la langue et de comprendre les cours. Alors, petit à petit, j’ai appris, j’ai beaucoup regardé le dictionnaire. Puis, je suis passée en 3e et ai obtenu mon brevet, avec mention bien. J’ai poursuivi au lycée Beaumont en seconde, en première jusqu’en terminale.

Après l'avis d'expulsion, une  « solidarité incroyable » 

En 2013, nous avons eu très peur. La demande d’asile faite par mes parents avait été refusée. Ils ont reçu un avis d’expulsion et il nous fallait quitter le territoire français. C’est sûr, la France n’est pas en guerre avec la Turquie mais la France ne reconnaît pas l’insécurité et la menace qui pèse sur les Kurdes en Turquie. Mes parents ont été assignés à résidence. Ils devaient pointer deux fois par semaine à la gendarmerie. A ce moment-là, il y a eu un grand mouvement de la population pour nous soutenir. Plusieurs associations se sont mobilisées : Amnesty International Redon, La Ligue des Droits de l'Homme, Soutien Migrants Redon, une association qui avait été créée en 2008 pour soutenir une famille congolaise. C’était incroyable de voir toute cette solidarité pour nous ! Les enseignants du collège de Bellevue et du lycée Beaumont m’ont beaucoup défendue mais il y a eu aussi le maire de Redon, le conseil municipal, le député et même le sous-préfet. Il y a eu plusieurs rassemblements et manifestations, plusieurs articles dans la presse.
 
Un permis de séjour provisoire
 
Mon père a finalement trouvé un emploi dans le bâtiment à Redon et en février 2016, la bonne nouvelle est arrivée ! Mon père a reçu un récépissé de permis de séjour de travailleur et moi, un titre de séjour mais valable seulement un an en tant qu’étudiante. Il doit se renouveler ensuite… Pour ma mère, les choses devraient se régulariser quand elle aura trouvé un emploi. L’association nous a versé un peu d’argent pour payer notre loyer. C’est grâce à toute cette solidarité que nous avons pu rester en France.
 
Bac S mention bien

J’ai pu passer un bac scientifique que j’ai obtenu avec mention bien. Grâce à une bourse, je suis entrée à l’IUT informatique à Nantes. Je dois passer mon diplôme en juin 2018. Ces études m’intéressent beaucoup et je souhaiterais ensuite poursuivre en école d’ingénieur. J’espère alors obtenir la nationalité française… Je veux vraiment remercier tous les Français qui nous ont accueillis, qui ont été avec nous, qui nous ont soutenus. Nous n’oublierons jamais cet élan de solidarité.
 
Propos recueillis par Monique Pussat-Marsac et Tugdual Ruellan.
 



1.Posté par Acar mehmet le 22/04/2018 15:19
Vildan c’est ma copine je l’aime trop

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Pourquoi ce blog ?
Michel Rouger
Et si l’on demandait à chacun d’entre nous ce qu’évoque la devise républicaine, ces trois petits mots, parfois bafoués, souvent mis à mal quand ils ne sont pas oubliés de nos frontons publics ? Et si l’on prenait le temps de s’interroger sur le sens qu’ils prennent ou qu’ils ont pris dans nos vies ?

Alors, les citoyennes et les citoyens nous diraient leur mécontentement, parfois leur colère de n’être pas considérés, entendus, écoutés. Ils nous diraient leurs peurs et leur fragilité dans une économie mondialisée, monétisée, déshumanisée. Ils hurleraient leurs doutes, leur mépris face aux promesses qui leur sont faites et qui ne sont pas tenues.

Mais ils nous diraient aussi leur joie d’être libres, de pouvoir dire, rêver, encore et toujours penser. Ils nous diraient malgré tout leur espoir de voir poindre des jours meilleurs, leur soif et leur espérance de justice et d’égalité.

A l’initiative du député Jean-René Marsac, nous sommes allés recueillir des paroles, des histoires de vie, des réflexions glanées sur ces bouts de chemin croisés. Histoires Ordinaires propose de les mettre en partage sur ce blog.

Tugdual Ruellan

« Les valeurs de notre République et de notre démocratie sont violemment attaquées. Vers de nouvelles formes d'engagement et de dialogue avec nos concitoyens »

Par Jean-René Marsac, député



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